dimanche 8 juin 2025

54 - Papillons de nuit

Du fond de la sombre grotte où je suis reclus, les papillons de nuit enchantent mes soirées de hibou solitaire. Ils sortent de leur noir espace pour saluer ma chandelle, tournoyant frénétiquement autour de cette perle de feu comme s'ils voulaient l'embrasser, ce qui anime agréablement mes longues heures de léthargie après le souper.
 
Leur présence sous mon toit vaut mieux que celle des humains : ils se montrent tellement plus légers qu'eux... Délicats et aériens, ils savent rester dans les hauteurs de mes vues d'esthète. Et puis surtout, je n'ai nullement besoin de les nourrir à grands frais.
 
Dans les profondeurs de la sylve, au coeur de cette immensité plongée dans les ténèbres, ces fantômes surgis de l'obscurité sont  toujours les bienvenus à ma table. Je ne me lasse pas de les voir tourner au-dessus de ma lampe. Ils apportent une ambiance chaleureuse dans la maison.
 
L'intrusion dans mon terrier de rustaud de ces aimables insectes m'est précieuse. Ces visiteurs nocturnes virevoltant à proximité de tout ce qui brille constituent une excellente compagnie dans ma demeure. Ils représentent les esprits de la forêt. J'attends avec bonheur que viennent se cogner à ma fenêtre ces flammes pâles et froides venues d'un autre monde.
 
Je fais le meilleur accueil à ces hôtes de marque, au même titre que les rats. Les uns rampent furtivement au niveau de mes pieds, les autres dansent dans l'air. On peut constater que mes convives sont issus des horizons les plus opposés de mon univers : les premiers remontent de la terre, les seconds descendent du ciel... Tous méritent le festin de mes miettes ou l'éclat de ma bougie. Mais revenons à nos moutons.
 
Véritables rêves incarnés de mes veillées, ces petites fées attirées par la maigre lueur de ma tanière y trouvent opportunément refuge.

Ces créatures célestes forment un firmament mouvant dans la pièce : lorsque leurs ailes s'éclairent à la lumière de mon cierge, je vois des étoiles voler dans mon foyer.

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