Du fond de la sombre grotte où je suis reclus, les papillons de nuit
enchantent mes soirées de hibou solitaire. Ils sortent de leur noir espace pour
saluer ma chandelle, tournoyant frénétiquement autour de cette perle de feu
comme s'ils voulaient l'embrasser, ce qui anime agréablement mes longues heures
de léthargie après le souper.
Leur présence sous mon toit vaut mieux que celle des humains : ils se
montrent tellement plus légers qu'eux... Délicats et aériens, ils savent rester
dans les hauteurs de mes vues d'esthète. Et puis surtout, je n'ai nullement
besoin de les nourrir à grands frais.
Dans les profondeurs de la sylve, au coeur de cette immensité plongée dans
les ténèbres, ces fantômes surgis de l'obscurité sont toujours les bienvenus à
ma table. Je ne me lasse pas de les voir tourner au-dessus de ma lampe. Ils
apportent une ambiance chaleureuse dans la maison.
L'intrusion dans mon terrier de rustaud de ces aimables insectes m'est
précieuse. Ces visiteurs nocturnes virevoltant à proximité de tout ce qui brille
constituent une excellente compagnie dans ma demeure. Ils représentent les
esprits de la forêt. J'attends avec bonheur que viennent se cogner à ma fenêtre
ces flammes pâles et froides venues d'un autre monde.
Je fais le meilleur accueil à ces hôtes de marque, au même titre que les
rats. Les uns rampent furtivement au niveau de mes pieds, les autres dansent
dans l'air. On peut constater que mes convives sont issus des horizons les plus
opposés de mon univers : les premiers remontent de la terre, les seconds
descendent du ciel... Tous méritent le festin de mes miettes ou l'éclat de ma
bougie. Mais revenons à nos moutons.
Véritables rêves incarnés de mes veillées, ces petites fées attirées par la
maigre lueur de ma tanière y trouvent opportunément refuge.
Ces créatures célestes forment un firmament mouvant dans la pièce : lorsque
leurs ailes s'éclairent à la lumière de mon cierge, je vois des étoiles voler
dans mon foyer.
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