Du fin fond de ma cachette de ragondin, je pars faire le tour de mon
infini. Plus précisément, je m'en vais longer les limites de mon univers
forestier. J'entreprends la promenade initiatique d'un lourdaud assumé : une
traversée des bois en grosses bottes.
L'aventure de ma solitude en marche.
Il n'y a rien d'autre à voir que la forêt, la friche et l'humus, certes je
le sais. Mais en même temps il y a tout à découvrir : le bout des choses et le
commencement du monde, le début d'un jour et le dénouement d'un voyage, le
départ de l'esprit et l'achèvement de l'acte.
Plus simplement, je parcours le cercle de ma journée, pas à pas, mon
chapeau sur la tête, un bâton à la main. Je n'en demande pas plus. Tourner
autour de mon soleil, telle est mon oeuvre sacrée au point culminant de ma
retraite sylvestre.
Ce foyer de réclusion et de liberté à la fois, à l'écart de toute
agglomération, demeure le centre brûlant de mon existence, même s'il passe pour
un terne asile. C'est là que je me suis enterré pour mieux m'envoler.
Je ne suis sur cette Terre que pour progresser, parfaire ma carrière de
vagabond statique, d'explorateur du silence, de baroudeur de l'isolement.
Et je chemine sous l'ombre des arbres à la poursuite d'un sommet,
c'est-à-dire à la rencontre de moi-même.
Le terrain est plat, la conquête élevée.
Je ne croise que mes pensées et n'entends que le bruit de mes semelles. Des
histoires bien suffisantes pour un pèlerin comme moi ! Là se trouvent mes
hauteurs indépassables de sédentaire.
Ce soir à mon retour je confierai les événements de ces heures trépidantes
à la flamme de ma cheminée qui, tout en chauffant ma marmite, éclairera mon
cloître.
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