Je sors souvent en quête de tout et de rien, vagabondant ici et là dans la
forêt, chaussé de mes rustiques sabots lorsque je ne m'éloigne pas trop de ma
demeure ou avec mes grosses bottes si je vais plus loin, dûment muni de mon sac
en lin, prêt à le charger au fil de mes découvertes.
Partant à la chasse à la chance, je fais ainsi de fructueuses promenades à
la poursuite de menues richesses, paré pour des récoltes de hasard, décidé à
décrocher les lots que voudra bien m'accorder la Création.
De chemins en sentiers et de friche en fourrés, je cherche donc de quoi
combler mon ample besace. J'espère alléger mon coeur en alourdissant mon fardeau
au fur et à mesure de mes trouvailles.
Je ne m'inquiète guère de revenir bredouille car même s'ils sont anodins,
il y a toujours des trésors à ramasser, des biens à ramener, d'éphémères joyaux
à admirer, des éclats à conserver dans ma mémoire ou des saletés à jeter dans le
feu de ma cheminée.
Ma moisson est diverse et variée. Je peux rentrer avec de simples branches
à brûler, de l'amadou à faire sécher devant l'âtre, des fruits et champignons
selon les saisons, des coulées de résine de pin à savourer, des pierres baroques
ou des bois noueux à collectionner et tant de nouvelles choses dérisoires ou
essentielles, belles ou étranges à manger, briser, lustrer, transformer, cuire,
tailler tels des diamants ou vouer à la flamme...
Je croise aussi des squelettes d'animaux comme des formes inconnues, des
charognes puantes et des fleurs admirables aux senteurs suaves, des reliques
quelconques et des traces d'antiques destins oubliés. Je cueille les unes,
laisse gésir les autres. Il y a de mauvaises herbes et de bons cailloux, de
bonnes plantes à prendre et de l'ivraie à ignorer, de l'humus de choix et de la
terre ne valant pas la peine de s'y pencher. Mille sources de joie ou de dégoût,
maints sujets de curiosité ou d'indifférence, plein d'opportunités végétales ou
minérales à me mettre sous la main. La nature est une mine inépuisable
d'opulences en tous genre qui sans cesse se renouvellent. Elle m'offre des
butins de misère ou des festins de vagabond, mais au moins ne me met jamais sur
la paille !
Quoi que je trouve et aussi peu que ce soit, pour moi c'est la pêche à la
fortune.
Après avoir traversé si vite ma journée en la remplissant si profitablement
de ces banales merveilles, je retourne à mon foyer. Avec sur le dos de quoi
ajouter chaleur et réconfort sous mon toit et illuminer ma soirée de rêves
palpables qui finiront soit dans mon assiette ou sur le bord de ma fenêtre, soit
dans la cendre.
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