mercredi 14 mai 2025

20 - À la chandelle

Dans mon refuge niché au coeur de la végétation, je progresse au rythme de la nature et m'éclaire à la bougie. Autant dire que je n'avance pas vite : pas après pas, jour après jour, chose après chose. Je fais ce que je dois faire, ne regardant que le cadran des saisons. Je ne suis pas plus rapide que la sève qui sourde ou que l'eau de la rivière qui coule.
 
L'éclat de ma chandelle me suffit amplement pour ensoleiller ma demeure. Cette lanterne d'intérieur me tient intimement compagnie car elle est comme une vivante présence. Je trouve bien plus de chaleur, de poésie et de réconfort dans cette humble flamme que dans une froide ampoule électrique.
 
Lorsque j'allume mon cierge, ce n'est pas pour illuminer uniformément la pièce mais pour la plonger dans une chaleureuse pénombre. Ce clair-obscur donne du relief à la solitude et au silence.
 
Et surtout, il fait apparaître des ombres pleines de vie.
 
Les murs autour de moi s'animent et je vois des géants se mouvoir au gré de cette goutte de feu s'agitant au bout de la mèche. Mon logis se peuple alors d'hôtes venus d'un autre monde, d'entités mystérieuses qui surgissent de nulle part et tremblotent dans les coins, glissent sur la pierre, se cachent dans les angles de la charpente...
 
Chez moi c'est la danse joyeuse des spectres de la nuit. Et la fête dans mon âme.
 
Avec cet unique flambeau posé sur le bord de la table, faiblement secondé par les braises de la cheminée, je passe de longues soirées à rêver sous mon toit d'ermite.
 
Je n'ai plus que des pensées ardentes pour m'occuper totalement.

Dans mon foyer de célibataire marié aux arbres de la forêt, la maigre source de mon chandelier fournit assez de lumière pour alimenter et entretenir mon bonheur. C'est à la lueur de cette étincelle qu'aux heures choisies je brille d'intelligence et de simplicité.

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